Climat: isolée, critiquée, l’administration Trump s’arc-boute

Montrée du doigt, isolée sur la scène internationale, la Maison Blanche a défendu vendredi son retrait de l’accord de Paris sur le climat, tout en refusant obstinément de dire si Donald Trump croyait en la réalité du changement climatique.

Les réactions ont fusé des quatre coins de la planète, dans la sphère politique mais aussi économique, entre stupeur, colère et effarement, après le discours du président américain annonçant l’abandon par les Etats-Unis de ce texte emblématique conclu fin 2015 par 195 pays.

«Le président a pris une décision très courageuse (…) Nous n’avons aucune raison de nous excuser en tant que pays», a lancé Scott Pruitt, administrateur de l’Agence de protection de l’environnement (EPA), assailli de questions au lendemain d’une décision qui a semé la consternation à travers le monde.

Au moment où les pays européens s’affichaient, avec la Chine, comme les nouveaux porteurs de flambeau de la «diplomatie climat», l’exécutif américain accusait ces derniers de monter au créneau sur ce thème pour nuire aux Etats-Unis.

L’accord de Paris sur le climat sans les Etats-Unis / AFP

«Le monde a applaudi quand nous avons signé l’accord de Paris. Vous savez pourquoi ? Parce qu’ils savaient que cela placerait notre pays dans une position désavantageuse», a lancé Scott Pruitt, l’un des plus farouches opposants à l’accord de Paris.

«La raison pour laquelle les dirigeants européens veulent que nous restions dans l’accord est qu’ils savent que cela va continuer à brider notre économie», a-t-il ajouté, dénonçant par ailleurs ceux qu’il a qualifiés d'»exagérateurs du climat».

Interrogé pour énième fois sur la position du 45e président des Etats-Unis sur le réchauffement climatique qu’il par le passé qualifié de «canular», son porte-parole Sean Spicer a esquivé: «Je n’ai pas eu l’occasion d’avoir cette discussion avec lui».

– Concert de condamnations –

Consensus scientifique autour du réchauffement climatique. / AFP

Coïncidence des agendas, le sommet annuel UE-Chine organisé vendredi à Bruxelles a offert une tribune aux deux partenaires pour clamer haut et fort leur engagement commun. «Aujourd’hui, nous accroissons notre coopération sur le changement climatique avec la Chine», a assuré le président du Conseil européen à l’issue de la rencontre.

Dès le début de la journée, le patron de la Commission européenne Jean-Claude Juncker avait dessiné les contours du nouveau moteur dans la lutte contre le changement climatique. «Notre partenariat (avec la Chine) aujourd’hui est plus important que jamais», a assuré M. Juncker.

La Chine, plus discrète que l’UE sur le sujet vendredi à Bruxelles, s’est tout de même dite prête à «chérir le résultat chèrement gagné» à Paris.

Aux côtés de Pékin, les Etats-Unis de Barack Obama avaient largement participé à la réussite de l’accord de Paris qui vise à contenir la hausse de la température moyenne mondiale «bien en deçà» de 2°C par rapport à l’ère pré-industrielle.

Le président américain Donald Trump à Washington, le 1er juin 2017 / AFP

Le retrait américain de cet accord pourrait, «dans le pire des scénarios», se traduire par une augmentation supplémentaire de 0,3 degré de la température du globe au cours du XXIe siècle, a estimé l’ONU.

Dans le concert de condamnations, peu de voix discordantes se sont fait entendre. Parmi elles, le président russe Vladimir Poutine s’est refusé à «condamner» son homologue américain, plaidant pour un «travail en commun» avec les Etats-Unis.

Dans un long discours, Donald Trump avait affirmé jeudi que l’heure était venue pour son pays de quitter l’accord de Paris, tout en souhaitant pouvoir négocier un nouvel accord, idée à laquelle les Européens ont opposé une fin de non-recevoir très ferme.

– Michael Bloomberg à l’offensive –

Les dates clés de l’accord de Paris sur le climat / AFP

«Je ne pense pas que nous allons modifier nos efforts pour réduire (nos propres) émissions de gaz à effet de serre à l’avenir», a tenté de rassurer vendredi le chef de la diplomatie américaine Rex Tillerson.

Les Nations unies, qui chapeautent l’accord, ont fait part de leur «grande déception». «On ne peut pas arrêter l’action concernant le climat», pas plus que le changement climatique est indéniable, a noté le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres.

En opposition au président américain qui affiche sa volonté de soutenir les énergies fossiles au nom de la défense de l’emploi, les Européens, mais aussi le Brésil ou la Nouvelle-Zélande, ont réaffirmé leur conviction que la transition énergétique était un facteur de croissance.

Aux Etats-Unis, de nombreuses figures du monde économique ont fait part de leur déception, et ont insisté sur l’urgence d’agir face au réchauffement.

De New York à la Californie, plusieurs dizaines de villes et d’Etats américains ont par ailleurs immédiatement organisé la résistance, promettant qu’au niveau local l’Amérique continuerait d’avancer vers une économie verte.

L’ex-maire de New York et philanthrope Michael Bloomberg a assuré, depuis l’Elysée, que les engagements des Etats-Unis seraient tenus, en dépit des choix de Donald Trump.

«Nous ne permettrons pas à Washington d’être sur notre chemin, c’est le message que les citoyens, les entreprises et les Etats fédérés envoient ce soir», a-t-il souligné aux côtés du président français Emmanuel Macron et de la maire de Paris, Anne Hidalgo.

L’objectif des Etats-Unis, fixé par l’administration Obama, était une réduction de 26% à 28% de leurs émissions de gaz à effet de serre d’ici 2025 par rapport à 2005.

©AFP