Rachat de TikTok par Microsoft : Donald Trump veut prélever son pourcentage

Le président américain estime que c’est lui et l’État fédéral qui rendent l’opération possible.

Si l’opération de rachat de TikTok aux États-Unis par Microsoft n’était pas encore assez complexe, Donald Trump, l’auto-proclamé «roi du deal» , s’est appliqué lundi soir à encore compliquer les choses. «Les États-Unis devraient obtenir un très gros pourcentage du prix [d’achat de TikTok], parce que nous permettons à ce deal d’avoir lieu, a lâché le président Donald Trump lors d’une conférence de presse lundi soir. Quel que soit son montant, la somme, à laquelle personne à part moi ne pensait, proviendra de la vente. Je pense que ce serait juste.»

Donald Trump, «le PDG de l’entreprise Amérique», comme le surnomme le New York Times , a effectivement donné son feu vert à l’opération, après avoir déclaré qu’il était contre et préférait bannir purement et simplement du territoire américain l’application chinoise. Sa déclaration de lundi soir laisse entendre qu’il veut faire payer à Microsoft son revirement. L’ancien magnat de l’immobilier new-yorkais a détaillé, par une métaphore, ce qu’il exigeait de Microsoft ou de «n’importe quelle entreprise très américaine» qui rachèterait TikTok : «C’est comme pour un propriétaire et un locataire: c’est le bail qui donne la valeur. Nous sommes le bail, en quelque sorte».

TikTok à prix cassé

Une telle demande a médusé les observateurs. «Trump veut que le gouvernement prenne un pourcentage de la vente de TikTok car c’est lui qui a créé de la valeur [pour Microsoft] en menaçant de bannir le chinois», tente d’expliquer dans un tweet le correspondant en chef du New York Times à la Maison-Blanche, Peter Baker. «Si vous négociez pour acquérir une entreprise dont l’unique alternative au rachat est la mort, vous avez un avantage certain et pouvez l’acheter à prix cassé», tweete, à contre-courant des autres analystes, le très influent journaliste financier Joe Weisenthal.

Les lois fédérales américaines ne prévoient pas de telles dispositions, qui se rapprochent de l’extorsion de fonds, selon certains critiques. «Il serait inédit, dans l’histoire récente, que l’État fédéral prélève un pourcentage d’une transaction impliquant des entreprises dont il n’est pas actionnaire», relève l’agence d’information financière Bloomberg. «Une telle idée est probablement illégale et contraire à l’éthique», a pour sa part estimé le professeur de droit Carl Tobias à l’Université de Richmond, cité par le Wall Street Journal .

Seul le Comité pour les investissements américains, le CFIUS, qui enquête notamment sur les rachats d’entreprises étrangères par des entreprises américaines, peut réclamer des frais de dossier, mais ceux-ci ne peuvent pas excéder les 300.000 dollars. Bien loin de l’ordre de grandeur que semble avoir en tête l’hôte de la Maison-Blanche.

 «Cambriolage à main armée»

La sortie de Donald Trump ne semble pas être une foucade improvisée sur l’estrade. Le président américain a déjà dû le mentionner lors de ses échanges avec le patron de Microsoft, Satya Nadella. La notion est en effet reprise par Microsoft dans son communiqué de lundi matin qui annonçait qu’il continuait les discussions avec Bytedance pour le rachat de TikTok aux États-Unis. À travers cette opération, écrit l’entreprise, «Microsoft s’engage à (…) générer des bénéfices économiques importants pour les États-Unis, y compris pour le département du Trésor». Toutefois, Bloomberg estime que cette phrase fait référence aux impôts et aux emplois que le géant des logiciels générera grâce au rachat.

Les autorités chinoises, elles, voient rouge. «La Chine n’acceptera en aucun cas le «vol» d’une entreprise technologique chinoise, peut-on lire dans un éditorial du très officiel China DailyElle a de nombreux moyens de réagir si l’administration américaine exécute son projet de cambriolage à main armée.»
@lefigaro.

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