Succession de Boris Johnson: Liz Truss et Rishi Sunak, ce qui les rassemble et ce qui les sépare

Qui sera le locataire du 10 Downing Street au soir du 5 septembre 2022 ? Entre la ministre britannique des Affaires étrangères Liz Truss, donnée favorite par les bookmakers, et l’ex-ministre des Finances Rishi Sunak, la campagne risque d’être animée ces prochaines semaines. Portraits.

Chemisier blanc assorti d’un nœud papillon et blazer noir, Liz Truss, 46 ans, se présente comme la digne héritière de Margareth Thatcher. Au point d’avoir copié son style vestimentaire au premier débat télévisé pour la direction du parti. Elle a travaillé dans le secteur de l’énergie et des télécommunications pendant dix ans avant d’entrer en politique. Si ses parents plaçaient le curseur à gauche, elle se positionnera à droite du Parti conservateur. Comme son adversaire, elle est passée par l’université d’Oxford.

En face d’elle, Rishi Sunak, 42 ans, est né à Southampton, de parents originaires de l’État du Pendjab, dans le nord de l’Inde. Son père, médecin, et sa mère, pharmacienne, se sont installés en Grande-Bretagne dans les années 1960. Après avoir travaillé dans la finance, il devient député, puis ministre. Il fut l’un des premiers soutiens de Boris Johnson pendant la campagne du Brexit.

Les petites casseroles de Sunak

Mais le fringant ex-ministre de l’Économie est l’opposé de l’ancien Premier ministre. Soigné, lisse, il ne fait pas de vagues. Sauf quand il décide, le 5 juillet dernier, de démissionner de son poste de chancelier de l’Échiquier à cause d’ « approches fondamentalement trop différentes » avec son leader. Une décision qui fait tomber Boris Johnson. S’ensuit une cascade de défections au sein du gouvernement. « N’importe qui d’autre que Rishi » aurait soutenu le Premier ministre démissionnaire pendant la course à la tête du parti.

https://twitter.com/RishiSunak/status/1549837100702482433

Le candidat va aussi devoir faire oublier deux informations révélées au printemps dernier. Sa femme est la fille d’une des plus grandes fortunes d’Inde, cofondateur du géant indien de la technologie Infosys. Alors qu’elle vivait avec son mari, ministre de l’Économie, à Downing Street, elle n’était pas domiciliée en Angleterre, mais en Inde. Une disposition légale qui lui a permis de ne pas payer d’impôt sur sa fortune colossale. Pas hors la loi donc, mais embarrassant. Elle a fini par modifier son statut et paie maintenant ses impôts dans le pays. Mais le mal est fait, cette révélation a nui à la réputation de son mari.

Autre embarras : comme Boris Johnson, Rishi Sunak va devoir payer une amende pour avoir participé au pot d’anniversaire de son Premier ministre pendant la pandémie. Il est ainsi, lui aussi, concerné par le Partygate.

Deux taches qui ne vont pas aider l’un des députés les plus riches du Parlement à prouver qu’il est l’homme du changement, qu’il saura s’adapter, alors que le pays traverse l’une des plus grandes crises du coût de la vie depuis des décennies.

Liz Truss, la candidate de Bojo

Liz Truss, actuelle ministre des Affaires étrangères, est la candidate de Bojo, sa continuité… sans les casseroles. Ou presque. Lors d’un discours pendant une conférence du parti, elle avait déclaré que l’importation par la Grande-Bretagne des deux tiers de son fromage était « une honte ». Un discours ridiculisé par la suite, notamment par les conservateurs.

Sur la politique, les deux candidats sont sur la droite ligne du parti. Leur principal point de désaccord : les impôts. Liz Truss dit vouloir les baisser afin d’alléger la charge sur la population. Une manière d’aider les Britanniques à supporter l’inflation, qui a atteint 9,4%. Une manière surtout de flatter les conservateurs qui vont voter. Mais ses détracteurs rappellent que l’inflation risque d’augmenter en réaction à la baisse des taxes.

Rishi Sunak, qui vient à peine de quitter son poste, se veut plus prudent. Pendant son mandat, il a augmenté les impôts en pleine pandémie, afin d’aider le service public en difficulté. Il a mis en place des programmes d’aide d’une valeur de plusieurs milliards d’euros pour maintenir les emplois et les entreprises. Il a, depuis, mis en garde contre les « choix difficiles à venir » pour s’attaquer aux niveaux records de la dette nationale contractée pendant la pandémie, malgré la crise sans précédent du coût de la vie.

Pas de baisse d’impôt avant 2024, donc. Et il s’agira de réductions qui « stimuleront la croissance », octroyées de « manière responsable », et seulement « après avoir maîtrisé l’inflation ». Il compare ainsi les annonces de Liz Truss à un « conte de fées réconfortant » dans lequel il déconseille de tomber.

Deux Brexiters convaincus

Pour le reste, ils sont plutôt d’accord. Et les deux jours de canicule n’ont pas rendu le réchauffement climatique plus intéressant à leurs yeux. Rishi Sunak reste sur sa position : « Il ne faut pas aller trop vite et trop fort sur l’action climatique. » Alors que Liz Truss compte suspendre la taxe sur l’énergie verte.

Les deux candidats se présentent aussi comme des Brexiters convaincus. Pourtant, Liz Truss avait voté contre en 2016, ce qui lui avait valu de nombreuses critiques de la part des conservateurs. Elle dit, depuis, qu’elle regrette et s’est rattrapée pendant son mandat de ministre en concluant des accords commerciaux post-Brexit avec le Japon et l’Australie. De son côté, Rishi Sunak avait soutenu le référendum dès ses premières heures et avait affirmé que le Royaume-Uni serait « plus libre, plus juste et plus prospère » en dehors de l’Union européenne.

L’envoi de migrants illégaux au Rwanda a toute sa place dans leurs programmes. Il faut dire que le projet controversé de la ministre de l’Intérieur, Priti Patel, est apprécié par les conservateurs.

Les deux finalistes ont tout l’été pour convaincre le parti, et cette fois, tous les membres des conservateurs sont concernés, y compris les militants. Le dernier sondage donne Liz Truss favorite, ce que balaie d’un revers de la main son adversaire. Il insiste : il est le seul à pouvoir battre Keir Starmer, le chef du Parti travailliste, aux prochaines élections générales, prévues en 2024.

 

@RFI

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *