France: la gauche attend la nouvelle Première ministre Élisabeth Borne au tournant

Le storytelling autour de la nomination d’Élisabeth Borne met en avant sa qualité de femme « de gauche ». Un signal destiné à rassurer les historiques d’En Marche méfiants face à la droitisation de la majorité, mais aussi les électeurs de la gauche modérée qui avaient entendu le message d’Emmanuel Macron dans l’entre-deux tours.

À peine nommée, Élisabeth Borne a dû faire face à un tir de barrage de l’opposition de gauche. Et pour cause : contrairement à ses prédécesseurs, Édouard Philippe et Jean Castex, la nouvelle Première ministre n’est pas nommée pour faire travailler la poutre à droite, mais pour retenir les électeurs de gauche après une élection présidentielle où certains avaient choisi Emmanuel Macron uniquement pour ne pas voter Marine Le Pen.

« Mme Borne serait une femme de gauche »

Jean-Luc Mélenchon ne s’y est pas trompé et a réagi très vite à l’annonce de la nomination d’Élisabeth Borne. Tout en ironie, il a déclaré : « Sa nomination commence dès les premiers instants par une tentative de tromperie, Mme Borne serait une femme de gauche ».

Pas question de lui donner acte d’une quelconque fibre « sociale » manifestée au cours d’un parcours de conseillère dans les gouvernements socialistes auprès de Lionel Jospin et Ségolène Royal notamment. Jean-Luc Mélenchon ne veut retenir que le profil de bonne élève d’une « techno » aux ordres d’Emmanuel Macron pour faire passer dans le quinquennat précédent des réformes jugées de « droite » notamment celle de la SNCF et de l’assurance chômage ou maintenant, la réforme des retraites qui doit permettre de repousser l’âge légal de départ à 65 ans, comme annoncé par Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle. La tonalité est la même du côté des écologistes. Julien Bayou a estimé que « le bilan d’Élisabeth Borne en matière sociale, c’est le bilan d’une femme de droite ».

Il n’en fallait pas plus pour réjouir les membres de la majorité. Le député de la Vienne Sacha Houlié par exemple, qui a estimé que les « impolitesses et les indélicatesses exprimées par les dirigeants de gauche, dont l’Insoumis en chef, permettaient de se rendre compte que la nomination d’Élisabeth Borne était réussie et à quel point elle les gênait ». Une manière d’entériner la stratégie du chef de l’État en vue de la campagne des législatives que la nomination de la nouvelle Première ministre a véritablement lancée.

L’enjeu des législatives

Une campagne dans laquelle Emmanuel Macron a ciblé Jean-Luc Mélenchon comme le principal adversaire. Lors d’un séminaire de formation des candidats investis par la majorité, le président de la République a affirmé que le « troisième tour » n’existait pas, une allusion directe à l’argumentaire de Jean-Luc Mélenchon. D’ailleurs, dès le lendemain de sa nomination à Matignon, Élisabeth Borne s’est rendue à l’Assemblée pour mobiliser les troupes en vue des législatives. Des législatives au cours desquelles elle va tenter d’obtenir son premier mandat électif dans le Calvados.

 À un mois de l’échéance électorale et en pleine séquence de lancement de la Nouvelle union populaire, écologique et sociale (Nupes), l’opposition de gauche joue gros. Jean-Luc Mélenchon a fait un pari : réunir les gauches, condition sine qua non pour pouvoir prétendre imposer sa nomination à Matignon à Emmanuel Macron, si les Français lui donnent une majorité au mois de juin. Pas question du coup de laisser trop d’électeurs de la gauche modérée succomber aux sirènes d’un gouvernement incarné par Élisabeth Borne.
@RFI

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