Basket: Ime Udoka, pionnier nigérian en NBA

Nommé entraîneur de la franchise mythique des Boston Celtics en début de saison, le Nigérian Ime Udoka est devenu le premier technicien Africain à prendre les rênes d’une équipe NBA. Menant la barque d’une main de maître, – les Celtics sont actuellement quatrième de la conférence Est -, l’ancien joueur a un parcours des plus originaux, et constitue un nouvel exemple que la meilleure ligue du monde s’ouvre de plus en plus aux talents venus du continent Africain, sur et aux bords des parquets.

28 Juillet 2021. Centre d’entraînement des Boston Celtics. Après plusieurs semaines de prospections, et des candidatures parmi certains entraîneurs à succès dans la ligue, dont Mark Jackson (ex Golden State Warriors) et Alvin Gentry (ex Los Angeles Lakers), la direction de la franchise mythique au trèfle vert marque l’histoire: ce sera le Nigérian Ime Udoka qui occupera le poste d’entraîneur principal de cette institution aux 17 titres de champions NBA.

Figure incontournable du basket africain

Ime Udoka devient ainsi le tout premier entraîneur venu du continent à prendre les rênes d’une équipe de la ligue Nord-Américaine. « Lorsque j’ai reçu le feu vert de la direction, et qu’on m’a annoncé que je serai le premier à devenir le technicien principal d’une équipe de la meilleure ligue du monde, ma première pensée a été pour mes parents, pour mon pays, et le peuple Nigérian. Ça a été un choc d’une certaine manière, mais je savais que j’étais prêt pour ce challenge », se souvient-il encore aujourd’hui, tout sourire.

Figure incontournable du basket africain, il a été un joueur NBA entre 2004 et 2010 chez les Los Angeles Lakers, Sacramento Kings et les San Antonio Spurs, Udoka est aussi un globe-trotter du ballon orange. Passé par l’Argentine, le Canada, la France (Vichy en 2005) et l’Espagne, Udoka a un parcours sinueux jusqu’à son poste actuel, et sa réussite est le résultat de beaucoup de sacrifices.

« Je suis passé par beaucoup de galères, à ne pas être payé par exemple, par des moments de doute, de solitude. C’était vraiment très, très éprouvant », précise-t-il, lui qui a trouvé le salut sur les bords du terrain, malgré l’instabilité du poste d’entraîneur adjoint jusqu’à l’an passé. « C’est mon côté «guerrier Nigérian» qui m’a permis d’avancer, de continuer à me battre. Les entraîneurs adjoints sont les premiers fusibles à sauter dans les équipes, même si le coach principal reste en place, notre poste peut être remplacé à tout moment. Mais je savais au fond de moi que j’avais quelque chose pour réussir dans ce métier, et j’ai continué à me battre. Mon sang Africain ne me fera jamais abandonner, jamais. Je n’ai pas le droit de baisser les bras, car je suis conscient aussi que ce genre de poste est extrêmement rare pour un technicien africain. Je n’ai pas le droit de me rater ».

Légende Nigériane, sur et en dehors des parquets

Bien avant que les jeunes talents Nigérians Precious Achiuwa (Toronto Raptors), Chimeze Metu (Sacramento Kings) et Josh Okogie (Minnesota Timberwolves) ne prennent le cœur de leurs compatriotes, Ime Udoka a montré la voie à toute une génération, en étant d’abord une légende de la sélection nationale.

Avec cinq AfroBasket disputés (deux médailles de bronze en 2005 et 2011), il a été aussi le leader des siens lors de la Coupe du monde 2006, au Japon. Véritable idole au Nigéria, Udoka porte toujours les couleurs vertes et blanches au cœur. Et cette expérience internationale avec les D’Tigers (ndlr: le surnom de l’équipe nationale masculine de basket du Nigéria), l’a aidé à ouvrir une première porte dans le coaching, du côté des Spurs de San Antonio, en 2012.

« Gregg Popovich et les Spurs ont toujours eu cette culture, cette ouverture à l’international, précise-t-il, et alors que l’équipe comptait des gars comme Tony Parker et Manu Ginobili, la franchise a voulu aussi s’ouvrir sur les talents qui pouvaient apporter sur les bords du terrain. J’ai donc eu une énorme opportunité de me montrer, et de prouver au meilleur coach de l’histoire que je pouvais faire ce métier. Coach Popovich, c’est un mentor pour moi, je lui dois tout ».

Après 7 saisons avec San Antonio et un titre de champion NBA en 2014, Udoka rejoint les Sixers de Philadelphie, puis les Brooklyn Nets sur demande expresse du Canadien Steve Nash, technicien en chef de l’équipe de New York. Durant les étés, il donne de son temps pour des camps de basket au Nigéria, mais aussi dans le staff de l’équipe des États-Unis, aux côtés de Steve Kerr, Gregg Popovich et des étoiles de la NBA. « Ce genre d’expérience, c’est juste fou. J’ai travaillé avec tous les plus grands durant ces passages avec Team USA, LeBron James, Kevin Durant, Carmelo Anthony, et j’ai pu gagner un titre olympique en 2020 avec l’équipe », explique-t-il. Tout en ayant un autre objectif en tête à l’avenir à savoir : « Aider la sélection Nigériane à gagner des titres, et à arriver sur le podium aux JO par exemple. »

Pourtant, il confie n’avoir jamais été contacté par la fédération de son pays. Depuis le début de l’exercice 2021-2022, l’un de ses rêves s’accompli et il franchi une nouvelle étape, et ayant les rênes de l’une des équipes les plus compétitives de la NBA, les Celtics de Boston.

À la hauteur du défi Celtics

Du côté du Massachusetts, le défi est de taille, mais Udoka rempli sa mission avec brio pour l’instant. Avec un bilan de 45 victoires pour 28 défaites, Boston est actuellement quatrième de la conférence Est, à seulement une victoire de retard sur la troisième place, occupée par les champions en titre, les Milwaukee Bucks. « Les Celtics, c’est un sacré morceau pour démarrer sa carrière de coach (rires) ! C’est comme récupérer un poste d’entraîneur principal de Manchester United, c’est une équipe mythique de notre sport. Mais je suis taillé pour ce genre de défi, et après quelques premiers mois à mettre en place nos principes de jeu, on tourne enfin à notre meilleur régime, au meilleur moment avec les playoffs qui se profilent à l’horizon », signale Udoka. Le Nigérian est ambitieux, et ne s’en cache pas : « On peut aller loin, et il y a eu l’exemple de Nick Nurse, qui a été champion avec les Toronto Raptors lors de sa première saison à la tête de l’équipe en 2017. Ce serait superbe que l’histoire se répète ! » sourit-il.

Le technicien de 44 ans sait aussi qu’il est scruté de près, aux quatre coins du continent africain, et vit cette expérience comme une mission. « C’est une immense fierté de représenter le Nigéria et d’être un pionnier, et je veux montrer à tous les Africains que c’est possible, que l’on peut être entraîneur au plus haut niveau du basket mondial. Si j’ai réussi à le faire, c’est que la porte s’est ouverte. J’ai saisi l’opportunité et je prouve que l’Afrique a du talent à tous les niveaux », annonce-t-il. Avant d’ajouter : « Il y a déjà beaucoup d’entraîneurs assistants Africains dans la ligue, comme Patrick Mutombo (RD Congo, Toronto Raptors), Jama Mahlela (Eswatini, Golden State Warriors), DeSagana Diop (Sénégal, Houston Rockets) et Amadou M’Bodji (Sénégal, Chicago Bulls) qui sont très importants dans leur équipe respective. Ils auront des opportunités de prendre la tête d’équipe dans un futur proche, j’en suis convaincu. Mais au-delà de mon seul exemple, cela permet de créer des vocations, et c’est mon vœu le plus cher pour les talents Africains: on peut devenir coaches, nous aussi. »

 

@RFI

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