Au Venezuela, 1er-Mai sous tension au lendemain d’une tentative de coup d’Etat

L’opposant Juan Guaido, qui avait annoncé mardi que des militaires l’avaient rejoint, a appelé à manifester mercredi pour pousser le président Maduro à quitter le pouvoir.

Après une journée très tendue, mardi 30 avril, le 1er-Mai risque d’être particulièrement troublé à Caracas. Le président vénézuélien, Nicolas Maduro, a dénoncé une « escarmouche putschiste » menée par l’opposant Juan Guaido qui aurait été « mise en échec ». Lors d’une allocution à la radio et à la télévision, mardi soir, il a annoncé « des poursuites pénales pour les graves délits commis contre la Constitution, l’Etat de droit et le droit à la paix ».

Après un retour au calme relatif mardi en fin de journée, les manifestants pro-Guaido devraient toutefois descendre de nouveau dans la rue mercredi 1er mai. Cette date avait été choisie il y a dix jours par le principal opposant à Maduro pour organiser « la plus grande manifestation de l’histoire » du Venezuela, afin de contraindre l’actuel président en exercice à quitter le pouvoir.

Que s’est-il passé le 30 avril ?

A l’aube du 30 avril, Juan Guaido a publié une vidéo sur les réseaux sociaux, annonçant depuis la base de La Carlota, près de Caracas, qu’un groupe de soldats l’avait rallié. Il était impossible de connaître, mercredi matin, le nombre de militaires ayant décidé de soutenir l’opposant de Maduro. Le gouvernement en place a affirmé qu’ils n’étaient qu’« un petit groupe de traîtres » et a dénoncé « une tentative de coup d’Etat ». Les forces de l’ordre loyalistes ont été envoyées aux abords de la base.

Des échauffourées ont éclaté entre celles-ci et les quelque 3 000 manifestants pro-Guaido présents. Selon le ministre de la défense, un soldat vénézuélien fidèle au président Nicolas Maduro a été blessé par balle face à la base militaire, désignant comme responsables « les dirigeants politiques de l’opposition ». Selon les services de santé locaux, au moins 69 personnes ont été blessées, dont deux par balle.

Mardi matin, un véhicule blindé a d’ailleurs foncé sur un groupe de manifestants pro-Guaido non loin de La Carlota, selon des images diffusées sur des chaînes locales et étrangères.

Comment la communauté internationale a-t-elle réagi ?

La Colombie, qui soutient Juan Guaido, a demandé une réunion d’urgence du groupe de Lima, qui réunit treize pays latino-américains et le Canada, afin de soutenir « le retour de la démocratie et de la liberté au Venezuela ». Parmi les autres figures internationales majeures ayant réitéré leur soutien à Guaido figurent également le président brésilien, Jair Bolsonaro, le président du Parlement européen, Antonio Tajani et le président américain. Le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo a déclaré mercredi que Donald Trump se tenait prêt, si nécessaire, à faire intervenir l’armée américaine.

Le président bolivien, Evo Morales, a, lui, dénoncé une « tentative de coup d’Etat de la part de la droite soumise aux intérêts étrangers », tout comme ses homologues cubain et turc. Recep Tayyip Erdoganavait d’ailleurs lui aussi fait face à un coup d’Etat le 16 juillet 2016, violemment réprimé. La Russie, qui a apporté un soutien militaire et logistique à Maduro, a, elle, dénoncé l’attitude de « l’opposition radicale qui a une nouvelle fois recours à des méthodes violentes de confrontation ».

De son côté, l’Espagne a appelé à éviter « une effusion de sang »« Pour nous, Guaido était et est le représentant légitime pour mener la transition. Il n’y a aucun doute à cela. Mais l’Espagne ne soutient aucun coup d’Etat », a déclaré la porte-parole du gouvernement espagnol, Isabel Celaa. Le gouvernement espagnol a, par ailleurs, confirmé au Monde que l’un des leaders de l’opposition vénézuélienne, Leopoldo López, libéré mardi de sa résidence surveillée par les militaires soutenant Juan Guaido, avait été accueilli avec sa femme et ses filles dans la résidence de l’ambassadeur d’Espagne au Venezuela.

D’où vient cette opposition entre Guaido et Maduro ?

Depuis le 23 janvier, le Venezuela, confronté à la plus grave crise de son histoire avec une économie au ralenti, une monnaie naufragée et des pénuries ; compte de fait deux présidents : le député de centre droit Juan Guaido, reconnu par une cinquantaine de pays dont les Etats-Unis, et le chef de l’Etat, le socialiste Nicolas Maduro, soutenu par la Chine et la Russie. C’est ce dernier qui gouverne actuellement le Venezuela, depuis sa réélection, en mai 2018, au cours d’un scrutin qui n’a été reconnu ni par l’Union européenne ni par les Etats-Unis.

Du fait de l’hyperinflation (10 000 000 %) et du chômage (44,3 %) subis par la population sous le mandat de Maduro, plus de trois millions de Vénézuéliens sont partis vivre à l’étranger, selon l’Organsisation des Nations unies (ONU).

© Le Monde avec AFP