Attentat de Ouagadougou : nouveau bilan provisoire de 18 morts et 22 blessés

Une enquête pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » a été ouverte et un appel à témoins lancé.

La scène d’horreur laisse un arrière-goût de déjà-vu. Des clients, venus dîner au café-restaurant Aziz Istanbul, tombent sous les balles de plusieurs assaillants. Il y a plus d’un an et demi, le 15 janvier 2016, le même scénario avait eu lieu à 300 mètres de là, au café-restaurant Cappuccino.

Maïza Sérémé, la procureure du Burkina Faso, l’a confirmé ce lundi après-midi : « Le mode opératoire était le même que le 15 janvier 2016 ». « Le type de terroriste était le même », « un commando de jeunes individus de sexe masculin », « à la peau claire et noire ». « L’armement était le même sauf que cette fois-ci, ils n’avaient pas de grenade et de liquide inflammatoire. Ils connaissaient les lieux et ils n’ont pas cherché à fuir », a-t-elle poursuivi. Comme lors de l’attaque du 15 janvier 2016, les assaillants étaient armés de kalachnikov et beaucoup de chargeurs ont été retrouvés sur les lieux de l’attentat.

« C’était un carnage. Une scène d’horreur », a confié au Monde Afrique un des gendarmes burkinabé qui a participé à l’assaut. Cette « boucherie », Delphine Kaboré l’évoque à mi-mot, choquée, depuis son lit d’hôpital :

« J’étais à la caisse, en train de taper mes bons de commande, lorsque j’ai entendu des coups de feu. Les gens couraient partout dans le restaurant. J’ai fait pareil et je suis tombée. Les gens me marchaient dessus. Ça m’a blessée, l’os de mon bras est sorti. »

L’assaut de plusieurs heures, mené par les forces spéciales du pays, a pris fin vers 4 heures du matin et aura permis de libérer 40 personnes, selon la procureure. Le bilan provisoire s’est quant à lui alourdi : « Nous déplorons malheureusement 18 personnes tuées et pour l’instant 15 ont été formellement identifiées, dont huit Burkinabè, deux Koweïtiens, un Canadien, un Sénégalais, un Nigérian, un Turc et un Français. Trois corps sont en cours d’identification. Les deux terroristes ont été abattus. Nous déplorons aussi 22 blessés dont cinq appartenant aux forces de défense et de sécurité », a précisé Maïza Sérémé.

Un deuil national de 72 heures

Sur l’avenue Kwame-N’Krumah, du nom du leader panafricaniste, la circulation reprenait petit à petit cette après-midi. Mais cette artère que l’on surnomme les Champs-Elysées du Burkina Faso, a perdu une nouvelle fois son âme. Retranché sur une rue parallèle de l’avenue, un Burkinabè exprime son désarroi : « Ils ont tué Kwame N’Krumah une deuxième fois. » Les regards hagards, les Burkinabè présents sur les lieux de l’attaque ne sont pas près d’oublier cette nuit sanglante, tantôt terriblement silencieuse, tantôt perturbée par les bruits assourdissants des tirs et des explosions.

Prochaine étape pour la justice du pays, déterminer les éventuelles complicités dans cette attaque. Un appel à témoins a été lancé. L’enquête, diligentée par le parquet burkinabè dans les heures qui ont suivi l’événement a été ouverte principalement pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste », « assassinat et tentative d’assassinat ».

De son côté, le président Roch Marc Christian Kaboré a décrété en conseil des ministres un deuil national de 72 heures « sur toute l’étendue de territoire national, à la mémoire des victimes de l’attaque terroriste ». Un acte que les Burkinabè ne connaissaient que chez leurs voisins sahéliens, jusqu’au 15 janvier 2016, date du premier attentat de l’histoire du Burkina Faso. L’attaque de ce dimanche 13 août prouve malheureusement que le « Pays des hommes intègres » va devoir, comme les autres pays de la région, vivre avec la montée de la menace terroriste. Et dire adieu à son statut longtemps mis en avant d’Etat stable, épargné par le djihadisme.

Source lemonde