Sénégal: une chanteuse interpellée pour «offense» au chef de l’Etat

Dakar – La chanteuse sénégalaise Amy Collé Dieng a été interpellée pour «offense» au chef de l’État, après des propos contre le président Macky Sall dans une vidéo diffusée sur internet quelques jours après les élections législatives.

Amy Collé Dieng, chanteuse de «mbalakh», musique sénégalaise basée sur les percussions, a été arrêtée jeudi soir à Dakar par la police, a indiqué à l’AFP une source policière.

Elle est accusée d'»offense au chef de l’État et diffusion de fausses nouvelles», selon la même source.

Le procureur de la République, Serigne Bassirou Guèye, a mis en garde dans la soirée les «personnes mal intentionnées qui utilisent les réseaux sociaux et autres sites internet pour diffuser des images ou propos obscènes, injurieux et même à caractère ethnique».

Une «mise en demeure est adressée» aux «auteurs de tels manquements (…) aux fins de mettre un terme à ces agissements répréhensibles, sous peine de poursuites judiciaires», a averti le procureur dans un communiqué.

Amy Collé Dieng se trouvait toujours en garde à vue vendredi soir à la Division des investigations criminelles (DIC, police judiciaire), selon un responsable administratif s’exprimant sous le couvert de l’anonymat.

La chanteuse a affirmé après son interpellation appartenir à un groupe sur la messagerie WhatsApp et ses propos n’étaient pas destinés à être rendus publics, selon une source proche de l’enquête.

Dans un enregistrement sonore diffusé jeudi sur des sites d’informations et sur les réseaux sociaux, la chanteuse s’est montrée favorable à l’ex-président Abdoulaye Wade (2000-2012), un des leaders de l’opposition lors des élections législatives du 30 juillet, et critique envers le président Sall.

Elle a accusé le chef de l’État sénégalais de «manœuvrer dans l’ombre» pour accomplir ses desseins et d’être un «saï-saï» («coquin» en langue wolof).

Elle lui a également reproché de n’avoir «rien fait dans le pays» depuis son élection en 2012 et d’avoir «volé les élections» législatives du 30 juillet. Elle a en outre dénoncé la gestion par le pouvoir du scrutin, marqué par d’importants problèmes d’organisation.

Après la diffusion de la vidéo, les autorités ont «mis à ses trousses» des enquêteurs, dont des policiers en civil, qui l’ont interpellée, a indiqué à l’AFP le responsable administratif.

Quatre personnes –trois femmes et un homme– ont été inculpés début juin pour «diffusion d’image contraire aux bonnes mœurs et d’associations de malfaiteurs» et placées en détention préventive à la suite de la diffusion d’un photomontage jugé offensant pour le président Macky Sall sur la messagerie WhatsApp. Le photomontage montre le visage du chef de l’État superposé au corps d’un homme nu.

L’arrestation d’Amy Collé Dieng survient après les élections législatives du 30 juillet dont les résultats officiels définitifs sont attendus vendredi.

Un total de 165 sièges à l’Assemblée nationale était à pourvoir à l’issue de ces élections pour lesquelles la majorité a revendiqué une large victoire.

La coalition du maire de Dakar, Khalifa Sall, en prison pour détournement de fonds présumé, estime avoir remporté la capitale et a annoncé qu’elle allait introduire des recours.

Le Sénégal, un des rares pays africains à n’avoir connu aucun coup d’État depuis son indépendance en 1960, et qui a vécu deux alternances pacifiques, en 2000 et en 2012, est souvent vanté comme un modèle de démocratie sur le continent.

©AFP