Qui est Pablo Hasél, le rappeur qui fait trembler le pouvoir espagnol ?

Il est devenu un symbole de la liberté d’expression dans son pays. Le rappeur Pablo Hasél a été arrêté ce mardi matin après s’être retranché à l’université Lerida, en Catalogne, refusant de purger la peine de six mois de prison dont il a écopé pour une série de tweets faisant l’apologie du terrorisme.

«C’est l’État fasciste qui m’arrête. Mort à l’État fasciste !» Le regard braqué vers les caméras, le rappeur espagnol Pablo Hasél, 32 ans, a exprimé sa colère alors qu’il venait d’être délogé ce mardi matin par les forces de l’ordre de l’université de Lerida, en Catalogne, où il était retranché depuis la veille avec une dizaine de sympathisants.

De son vrai nom Pablo Rivadulla Duro, cet artiste issu de la scène underground avait été reconnu coupable en juin dernier d’apologie du terrorisme, d’injures et de calomnie à l’encontre de la couronne et de l’État suite à une série de tweets datant de la période 2014-2016 dans lesquels il insultait les forces de l’ordre espagnoles, les accusant de tortures et d’assassinats. «50 policiers blessés ? Si ces mercenaires de merde se mordaient la langue en bouffant une hostie, ils diraient qu’ils sont blessés». 

Ou encore celui-ci, retrouvé par El Periodico :  «Tu tues un policier ? Ils sont capables de te chercher sous une pierre. Le police assassine ? Aucune enquête». Et encore celui-ci, où il estime que le terroriste de l’ETA, l’organisation paramilitaire indépendantiste basque, a été «assassiné par la police».

Un personnage qui divise l’Espagne

Condamné à neuf mois de prison ferme, il avait jusqu’au vendredi 12 février pour se rendre de lui-même aux autorités. Ce dont il s’était bien gardé, contestant depuis le début de la validité de sa sentence. «Ils devront venir m’enlever et cela servira aussi à dépeindre l’État sous son vrai visage, celui d’une fausse démocratie», avait-il déclaré à l’AFP avant de se retrancher à l’Université de Lerida.Depuis plusieurs semaines, le cas de Pablo Hasél divise la société espagnole. Fils d’un entrepreneur catalan, il a déjà été condamné à plusieurs reprises pour ses textes faisant référence aux organisations armées d’extrême gauche comme les Groupes de résistance antifasciste du 1er octobre (Grapo), classés dans la liste des organisations terroristes par les Etats-Unis, et accusés d’un millier d’actions violentes entre 1975 et 2003 en Espagne, avec à la clé 80 assassinats et tentatives de meurtre.

Pablo Hasél, qui a découvert le rap à l’âge de 10 ans en écoutant la formation américaine NWA et son album culte Straight Outta Compton, a choisi son nom de scène en référence à un conte arabe dans lequel un guérillero fait tomber la monarchie. Dans l’une de ses chansons, baptisée Morts aux Bourbons, il s’attaque à la famille royale espagnole qu’il accuse d’être l’héritière du régime franquiste.

Javier Bardem et Pedro Almodovar le soutiennent

Jusqu’ici, la justice s’était montrée clémente à son égard, en raison de son absence d’antécédents judiciaires. Après avoir écopé de lourdes amendes, c’est la première fois qu’il était condamné à de la prison ferme, une sanction qui fait débat. Alors que Pablo Hasél a reçu le soutien de personnalités comme l’acteur Javier Bardem et le cinéaste Pedro Almodovar, signataires d’une tribune parue dans la presse, l’affaire est devenue une épine dans le pied du Premier ministre socialiste Pablo Sanchez.
Depuis plusieurs mois, son gouvernement a en effet promis de réfléchir à une réforme pour que les excès verbaux commis dans le cadre de manifestations artistiques, culturelle ou intellectuelles, ne relèvent plus du droit pénal et ne se traduisent plus par de peines de prison. La semaine dernière, le porte-parole Maria Jesus Montera avait  lui-même reconnu le «manque
de proportionnalité»
 de la peine infligée au jeune artiste.Ce mardi, le parti de gauche radicale Podemos, partenaire des socialistes, s’est indigné de l’arrestation de Pablo Hasél. «Tous ceux qui se considèrent progressistes et se vantent de la pleine normalité démocratique devraient avoir honte. Vont-ils fermer les yeux ? Il n’y a pas de progrès si nous ne voulons pas reconnaître les manques démocratiques actuels», a réagi la formation politique sur Twitter.

@lci.fr

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