A cent jours de l’élection présidentielle aux Etats-Unis, le point sur la course à la Maison Blanche

Dans le contexte de pandémie, le cinquante-neuvième scrutin présidentiel du pays est d’ores et déjà marqué par une campagne chamboulée.

Le compte à rebours est lancé : dans cent jours, à compter du dimanche 26 juillet, les Etats-Unis connaîtront le nom de celui qui occupera la Maison Blanche pour les quatre prochaines années. Mais, en raison de la pandémie de Covid-19, le cinquante-neuvième scrutin présidentiel est d’ores et déjà marqué par une campagne chamboulée – « la plus étrange de l’histoire moderne », selon le candidat démocrate, Joe Biden.

Quand aura lieu l’élection présidentielle ?

Elle se tiendra le mardi 3 novembre. Sans surprise, car cette date découle d’une longue tradition. Depuis 1845, le jour de l’élection du président des Etats-Unis (election day) se déroule le mardi suivant le premier lundi de novembre. Pour comprendre le choix de cette date, il faut « se représenter ce qu’était l’Amérique du XIXsiècle », expliquait, à l’occasion de la présidentielle de 2016, la radio publique NPR, où la plupart des gens « étaient des agriculteurs, des chrétiens dévoués et avaient besoin de temps pour voyager [jusqu’aux bureaux de vote] ». Pas question, donc, d’organiser l’élection durant le week-end (en vertu de la loi religieuse), ni lors des périodes de travail intense des agriculteurs.

Mais ce qui relevait de la commodité à l’époque est un inconvénient aujourd’hui : la plupart des citoyens travaillent le mardi. Les bureaux de vote sont donc fréquentés tôt le matin et en début de soirée, juste avant leur fermeture, ce qui se traduit par des queues parfois interminables qui découragent certains électeurs. Depuis plusieurs années, nombre de voix s’élèvent pour mettre un terme à cette tradition. Sans succès à ce jour.

Qui sont les principaux candidats ?

Deux partis se partagent la part du lion dans la vie politique américaine : le Parti républicain (Grand Old Party, GOP) et le Parti démocrate. L’affiche de leur duel pour ce 59e scrutin est connue depuis déjà quelques mois, mais elle doit encore être officialisée lors des conventions nationales de ces deux formations.

Donald Trump, le 23 juillet 2020 à la Maison Blanche. Evan Vucci / AP

Le républicain Donald Trump, 74 ans, brigue un nouveau mandat. Il est seul candidat en lice dans les rangs du GOP. Un petit groupe de républicains s’active toutefois pour dénoncer son « incompétence » et les ravages que provoquerait sa réélection. Réunis au sein de l’organisation Lincoln Project (en hommage au président qui a mis fin à la division du pays après la guerre civile), ils portent l’une des rares voix discordantes dans ce camp politique.

En outre, début juin, l’ancien secrétaire d’Etat et chef d’état-major des armées Colin Powell a annoncé son soutien au candidat démocrate, devenant la première personnalité républicaine d’envergure à se prononcer publiquement en faveur du rival de Donald Trump.

Joe Biden, candidat démocrate à la présidentielle 2020, lors d’une intervention aux industries McGregor à Dunmore, Pennsylvanie, le 9 juillet. Matt Slocum / AP

Le démocrate Joe Biden. Depuis le mois d’avril, les caciques démocrates se sont ralliés à leur candidat, Joe Biden. L’ancien vice-président de Barack Obama et ex-sénateur du Delaware, âgé de 77 ans, a conquis l’investiture de la formation à la faveur du retrait de son rival, Bernie Sanders.

Lire aussi l’analyse : Bernie Sanders apporte un soutien clair à Joe Biden pour la présidentielle 2020

Le sénateur indépendant du Vermont, qui avait longtemps critiqué la tiédeur du programme de Joe Biden, a justifié ce rassemblement par une priorité : « vaincre quelqu’un qui (…) est le président le plus dangereux de l’histoire moderne de ce pays ». Mais cet appui risque toutefois de rester sans effet sur la frange la plus déterminée de son électorat. A gauche, le miniparti des Democratic Socialists of America, a, en effet, annoncé qu’il refusait de se ranger derrière l’ancien vice-président.

Y a-t-il d’autres candidats ?

Si le système politique aux Etats-Unis repose sur le bipartisme, cela n’empêche pas d’autres candidats de se lancer dans la course – même s’ils ne se présentent pas dans tous les Etats, faute de financement ou de parrainages. Cette année, il faudra notamment compter sur la présence des écologistes du Green Party, avec le « ticket » Howie Hawkins, à la présidence, et Angela Walker, à la vice-présidence. Mais aussi des libertariens, dont la candidate, Jo Jorgensen, a été désignée le 23 mai.

Le rappeur Kanye West, lors de son meeting de campagne à Charleston, en Caroline du Sud, le 19 juillet. RANDALL HILL / REUTERS

Autre prétendant à la fonction suprême, le rappeur Kanye West, qui a tenu son premier – et lunaire – meeting de campagne le 19 juillet à Charleston, en Caroline du Sud. Celui-ci n’a déjà plus aucune chance d’être élu président, car les inscriptions sont déjà closes au Texas et en Floride, deux Etats majeurs pour le scrutin. Mais il est bien inscrit dans certains Etats, comme l’Oklahoma.

Si ces « petits candidats » n’obtiennent en général que de très faibles scores, ils peuvent parfois avoir un impact réel sur l’issue du scrutin. En 2000, le candidat démocrate, Al Gore, avait été déclaré perdant contre le républicain George W. Bush, pour 537 voix en Floride, Etat où Ralph Nader du Green Party avait recueilli 97 000 votes.

Y a-t-il un favori ?

Les deux principaux candidats à l’élection présidentielle américaine de 2020, Joe Biden et Donald Trump. ROBYN BECK,SAUL LOEB / AFP

Donald Trump fait face à de nombreuses critiques dans sa gestion de la pandémie de Covid-19, mais aussi dans sa réaction aux manifestations contre les violences policières et le racisme déclenchées par la mort de George Floyd. Son image a été abîmée par ces trois mois de crise.

Selon l’agrégateur de sondages du site Real Clear Politics, le 24 juillet, son rival Joe Biden jouit d’une avance de 8,7 points dans les intentions de vote. Mais ces résultats sont purement indicatifs puisque l’élection se joue au niveau des Etats. L’ancien vice-président le devance toutefois, pour l’instant, dans la majorité des Etats-clés de 2016, comme la Floride, la Pennsylvanie ou le Wisconsin, tout comme dans l’ancien bastion républicain de l’Arizona.

« Trump est en retard par rapport à Biden dans de nombreux Etats-clés, mais il garde toutes ses chances compte tenu de la détermination de sa base », rappelait cependant, début juillet, notre correspondant à Washington, Gilles Paris.

Quelles sont les prochaines étapes ?

Le président des Etats-Unis, Donald Trump, dans les jardins de la Maison Blanche, à Washington, le 23 juillet. JIM WATSON / AFP

Les meetings de campagne en suspens

Confiné pendant de longues semaines, M. Biden n’a organisé aucune sortie publique entre le 15 mars et le 25 mai. Le 30 juin, il a décidé qu’il ne tiendrait aucun meeting de campagne en raison de la crise sanitaire. Risquée, cette annonce marque un net contraste avec Donald Trump : le républicain a été vivement critiqué pour avoir organisé, le 20 juin, un meeting de retour en campagne à Tulsa, dans l’Oklahoma, qui a réuni plusieurs milliers de personnes dans cet Etat du Sud en pleine flambée de cas de Covid-19.

En août : les conventions nationales

Les partis organisent, durant l’été qui précède la présidentielle, une convention nationale. Celle-ci est à la fois le dernier acte d’une campagne interne à chaque formation et le coup d’envoi de la véritable course à la Maison Blanche. C’est au cours de ces conventions que les délégués investissent officiellement leur candidat à la présidence et à la vice-présidence – le « ticket ».

En raison de la pandémie de Covid-19, Donald Trump a fait savoir, le 23 juillet, que son discours d’acceptation d’investiture prévu à Jacksonville, en Floride, au mois d’août, n’aurait pas lieu. « On fera des meetings en ligne », a précisé M. Trump. De leur côté, les démocrates ont annoncé, il y a un mois, que la convention nationale, prévue à Milwaukee dans le Wisconsin, du 17 au 20 août, se ferait quasi intégralement en ligne.

Du 29 septembre au 22 octobre : les débats

Trois débats entre Donald Trump et Joe Biden sont prévus – la présence des autres prétendants n’étant pas encore confirmée – et un débat entre les vice-présidents potentiels. Le premier se tiendra le 29 septembre, à l’université Notre-Dame, dans l’Indiana. Les suivants auront lieu le 15 octobre à l’université du Michigan, à Ann Arbor, et le 22 octobre à l’université de Belmont, à Nashville (Tennessee). Les vice-présidents potentiels, eux, débattront le 7 octobre, dans l’Utah.

Le 3 novembre : le jour du vote

Le président des Etats-Unis est élu au suffrage indirect. Ainsi, lorsqu’ils se rendent aux urnes, les citoyens ne désignent donc pas un candidat mais des grands électeurs, en fonction de leur soutien à tel ou tel candidat. Les voix ne sont pas décomptées au niveau national mais au niveau de chaque Etat. Chacun d’entre eux dispose d’un nombre spécifique de grands électeurs, déterminé par son poids démographique et correspondant au nombre de représentants qu’il a au Congrès. Un candidat doit obtenir au moins 270 grands électeurs, sur 538, pour être élu.

Le 20 janvier : l’investiture

Le mandat des 538 grands électeurs étant quasi impératif – la Cour suprême a rendu le 6 juillet un arrêt permettant aux Etats de sanctionner ceux qui ne suivraient le vote exprimé le jour de l’élection –, dès l’instant où l’ensemble du collège est élu, on connaît le nom du futur locataire de la Maison Blanche. Mais l’élection « officielle » n’aura lieu qu’en décembre et le président ne prendra ses fonctions que le 20 janvier 2021.

@ Le Monde

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