Côte d’Ivoire : Alassane Ouattara réélu, l’opposition accusée de « complot » contre l’Etat

La résidence du chef de l’opposition, Henri Konan Bédié, à Abidjan, a été encerclée par les forces de l’ordre, quelques heures après l’annonce de la réélection du président Ouattara pour un troisième mandat controversé.

Le président ivoirien, Alassane Ouattara, 78 ans, a été réélu, mardi 3 novembre, pour un troisième mandat controversé à l’issue d’un scrutin boycotté par l’opposition, qui veut former un « gouvernement de transition » et se voit accuser de « complot » contre l’Etat par les autorités.

En début d’après-midi à Abidjan, la résidence du chef de l’opposition, Henri Konan Bédié, qui ne reconnaît pas la réélection du président Alassane Ouattara, a été encerclée par les forces de l’ordre. Elles ont tiré des gaz lacrymogènes pour disperser les journalistes et les militants et empêcher la tenue d’une conférence de presse que devait donner l’opposition à la résidence de l’ancien président.

Les résultats provisoires de la présidentielle de samedi ont été proclamés par la Commission électorale indépendante (CEI) mardi à l’aube : M. Ouattara a obtenu, selon les chiffres de la CEI, le score fleuve de 94,27 % des voix au premier tour. Un résultat qui interroge, aucun procès-verbal des résultats n’ayant été affiché à la sortie des bureaux.

La veille, l’opposition, qui juge ce nouveau mandat « inconstitutionnel » et ne reconnaît plus Ouattara comme président, avait annoncé qu’elle avait créé un « Conseil national de transition » pour former un « gouvernement de transition ».

Une prise de position qualifiée mardi par le ministre de la justice, Sansan Kambile, de « complot contre l’autorité de l’Etat et l’intégrité du territoire national ». « Le gouvernement a saisi le procureur de la République d’Abidjan afin que soient traduits devant les tribunaux les auteurs et les complices de ces infractions », a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse. Interrogé sur une possible arrestation des leaders de l’opposition, M. Kanbile a répondu : « Toutes les options sont sur la table. Il [le procureur] pourra envisager sereinement toutes les options à sa disposition. »

Les Ivoiriens, eux, craignent de nouvelles violences, alors qu’une quarantaine de personnes ont été tuées depuis le mois d’août, dont au moins neuf depuis le vote samedi dans des troubles liés à la candidature du président Ouattara.

Le compteur des mandats présidentiels remis à zéro

Mardi, l’Union européenne a « pris note de l’annonce des résultats provisoires » et exprimé « sa vive préoccupation concernant les tensions, les provocations et les incitations à la haine qui ont prévalu et continuent de subsister dans le pays autour de ce scrutin ».

Selon les chiffres de la CEI, le taux de participation – un enjeu important de ce scrutin du fait du boycott de l’opposition –, est de 53,90 %. Des militants de l’opposition, qui avait appelé à la « désobéissance civile », ayant saccagé ou bloqué environ 5 000 bureaux de vote, 17 601 bureaux des 22 381 bureaux ont pu ouvrir, selon la CEI.

Le candidat indépendant Kouadio Konan Bertin est deuxième avec 1,99 % des voix, devant les deux autres candidats qui avaient appelé au boycott : l’ancien président Henri Konan Bédié (1,66 %) et l’ex-premier ministre Pascal Affi N’Guessan (0,99 %). La CEI a trois jours pour transmettre ces résultats au Conseil constitutionnel, qui a sept jours pour les valider ou non.

Elu en 2010, réélu en 2015, Alassane Ouattara avait annoncé en mars qu’il renonçait à une nouvelle candidature, avant de changer d’avis en août, à la suite du décès de son dauphin désigné, le premier ministre Amadou Gon Coulibaly.

La loi fondamentale ivoirienne prévoit un maximum de deux mandats, mais le Conseil constitutionnel a estimé qu’avec la nouvelle Constitution adoptée en 2016, le compteur des mandats présidentiels a été remis à zéro. Ce que l’opposition conteste.

« Ces résultats sont de la mascarade »

L’ancien président de la Côte d’Ivoire Henri Konan Bedié, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), s’exprime après une réunion avec les partis de la coalition d’opposition ivoirienne à Abidjan, le 2 novembre 2020. LUC GNAGO / REUTERS

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